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La vraie spiritualité
6. Le salut: Passé - Futur - Présent

Francis A. Schaeffer
Editions La Maison de la Bible

Selon le récit de la Bible, la faute de l'homme en Eden a eu lieu à un moment précis de l'histoire et, à la suite de cet événement, son état et celui du monde placé sous sa domination sont devenus anormaux. A regarder le cours de l'histoire, il semble que la création par Dieu d'êtres rationnels et moraux a été un échec.

Mais Christ est venu; il est mort et ressuscité dans le cours même de l'histoire, et il a remporté la victoire nécessaire sur le mal. Le retour de Christ apportera la preuve éclatante de sa victoire. De nos jours cependant, la terre ne connaît pas de paix universelle, ni pour l'individu, ni pour l'humanité dans son ensemble. Le monde du XXe siècle n'est au fond guère différent du monde assyrien, babylonien ou romain.

Est-ce à dire que depuis la crucifixion et jusqu'au retour du Seigneur Jésus-Christ, Dieu a voulu supprimer tout signe de la victoire remportée à la croix?
Une lecture attentive de l'Ecriture montre précisément que son intention est à l'opposé: "Vous, au contraire, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, afin que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui autrefois n'étiez pas un peuple, et qui maintenant êtes le peuple de Dieu, vous qui n'aviez pas obtenu miséricorde, et qui maintenant avez obtenu miséricorde." (1 Pierre 2:9-10)

Ce passage déclare qu'ici-bas les chrétiens ont une vocation bien précise : celle de proclamer les louanges de Dieu. Autrement dit, Dieu n'a pas voulu qu'entre l'ascension de Jésus et son retour, la victoire remportée sur la croix soit ignorée. Dieu a voulu, Dieu veut que les chrétiens soient la preuve, la manifestation de la victoire de Christ sur la croix.

Le chrétien est appelé à croire en la saine et vraie doctrine, celle de l'Ecriture. Cependant, notre vocation ne se limite pas à exposer correctement la saine doctrine. Elle ne se réduit pas non plus à déployer une activité qui mette en oeuvre nos aptitudes naturelles, notre personnalité ou notre énergie. Le chrétien n'est pas appelé à présenter, en utilisant des moyens classiques, un message de plus qui s'ajouterait à tous les autres. Certes, ce que nous faisons est important, mais notre manière de le faire l'est également, comprenons-le bien. Au premier chapitre des Actes, entre la résurrection et l'ascension, Christ ne recommande pas uniquement de prêcher l'Evangile. Il ordonne d'attendre d'abord le Saint-Esprit, et après cela de prêcher.
Car prêcher sans l'aide du Saint-Esprit, c'est se méprendre totalement sur le sens du commandement de Christ pour notre temps. Dans les activités chrétiennes ou le service chrétien, la manière de faire est au moins aussi importante que l'activité elle-même. Tout ce qui dans la vie du chrétien ne manifeste pas l'existence de Dieu ici-bas est un échec. Selon la Bible, nous sommes appelés à vivre, dans notre existence présente, une vie surnaturelle d'une façon tout autre que celle que nous connaîtrons pendant l'éternité. Nous sommes appelés à vivre cette vie surnaturelle maintenant, par la foi. Dans l'éternité, tout sera merveilleux, mais n'y auront pas place l'appel, la possibilité et le privilège de vivre, par la foi, une vie surnaturelle ici-bas, avant de voir Jésus face à face.

La manifestation que Dieu veut donner au monde jusqu'au retour de Christ, c'est l'exemple du chrétien. Les chrétiens sont appelés à manifester, dans leur époque, l'existence du monde surnaturel, le monde généralement invisible et, au delà, l'existence de Dieu. Individuellement comme en groupe et à chaque génération, les chrétiens doivent offrir cette manifestation à leurs contemporains; en ce qui nous concerne, les hommes de la seconde moitié du XXe siècle. A l'évidence, nous ne pouvons rien faire pour les générations passées; et pour les futures, ce que nous leur laisserons par nos écrits et nos oeuvres, sera fragmentaire, même si nos témoignages s'enrichissent, au cours des siècles, à la manière d'une boule de neige. Mais l'important pour chaque chrétien est d'être témoin en son temps et face à sa propre génération.

Les chrétiens doivent refléter le caractère de Dieu, reflet de nature morale, qui ne se limite pas à l'énoncé de principes. Ils sont appelés à rendre manifestes l'être et l'existence de Dieu lui-même. Quelle vocation et quelle responsabilité! Quiconque est entièrement honnête et se garde de sentiments romanesques ou idéalistes (au sens péjoratif du terme) comprendra qu'une telle manifestation resterait absolument insignifiante si elle dépendait de ses propres efforts, de ses seules ressources. Nous voyons, là encore, la pertinence de l'enseignement biblique selon lequel Christ, l'époux, produit son fruit à travers nous - par la puissance du Christ crucifié et ressuscité et par l'action du Saint-Esprit au moyen de la foi; cet enseignement loin d'être isolé concorde avec l'unité de l'enseignement biblique sur la vocation du chrétien dans ce monde. Telle est la deuxième expression d'unité de l'enseignement biblique que nous considérons. La première était l'unité de l'enseignement biblique au sujet du caractère surnaturel de l'univers.

Une troisième expression de l'unité de l'enseignement biblique est celle de l'unité de la doctrine du salut. Selon la Bible, Dieu me déclare immédiatement justifié dès que j'accepte Christ comme mon Sauveur. Dans sa fonction de Juge, Dieu déclare ma culpabilité ôtée, sur la base de l'œuvre substitutive de Christ. Cela ne veut pas dire que Dieu ferme les yeux sur le péché. Il est saint, et parce qu'il est saint, tout péché entraîne une culpabilité véritable. Mais lorsque j'accepte Christ comme mon Sauveur, mon péché a été puni en Christ, sur la croix, dans l'histoire, l'espace et le temps. Dieu me déclare justifié de ma culpabilité, jusqu'à effacer le souvenir de mon péché. Sur la croix, Jésus a pris sur lui la totalité de notre châtiment, ce qui écarte pour nous tout châtiment à subir dans cette vie ou dans l'autre. Parce que Christ est Dieu, sa mort substitutive a une valeur infinie - suffisante pour couvrir tous les péchés de chaque individu et toute la culpabilité de tous ceux qui viendront un jour à lui.

Il faut comprendre la justification comme un acte absolument irrévocable, car Christ a pris sur lui le châtiment de tous nos péchés, et pas seulement de ceux que nous avons commis jusqu'à notre conversion. Plus rien n'est inscrit au débit de notre compte. Ainsi, de ce point de vue, qui est le point de vue biblique, il n'y a pas de degré dans la justification. On n'est pas plus ou moins justifié. En ce sens, on ne peut pas être plus ou moins chrétien. On est chrétien, ou on ne l'est pas. De la même manière qu'une personne est née, ou ne l'est pas, mariée devant Dieu, ou pas, de la même manière on a accepté Christ comme Sauveur et l'on est, par conséquent, déclaré juste par Dieu, ou on ne l'a pas accepté. Il n'y a pas de demi-mesure; et il n'y a pas de degré dans la justification. La culpabilité du chrétien est entièrement et définitivement ôtée. Pour le chrétien, la justification appartient donc au passé.

Mais il y a une erreur à ne pas commettre. Le mot "salut", tel que l'Ecriture l'entend, a un sens bien plus large que celui de justification. Il a une portée dans le présent et le futur aussi bien que dans le passé. L'œuvre parfaite de Christ sur la croix n'apporte pas seulement la justification du chrétien. Elle permet également sa glorification dans l'avenir; au retour de Christ, interviendra la résurrection du corps et s'ouvrira l'éternité. L'aspect présent du salut consiste en notre sanctification. La sanctification se conjugue au présent, c'est la relation présente avec notre Seigneur.

La sanctification est sujette à gradation. Nous avons relevé l'absence de degré dans la justification, car notre culpabilité est ôtée une fois pour toutes. Mais notre relation présente avec le Seigneur connaît des fluctuations. Il existe des degrés de sanctification divers d'un chrétien à l'autre et nous devons bien reconnaître qu'il en est de même, selon les moments, dans notre vie personnelle.

La vie chrétienne ne ressemble pas à une courbe ascendante continue. Nous passons par des hauts et des bas; ne pas le reconnaître serait se bercer d'illusions. S'il n'est pas possible d'être plus ou moins justifié, il est possible d'être plus ou moins sanctifié. La justification règle la question de notre culpabilité en tant que pécheurs. La sanctification s'oppose à la puissance du péché dans la vie du chrétien, et cette lutte se fait par paliers.

Le salut n'est pas un processus qui, après la justification, reste en suspens jusqu'à la mort; tel n'a jamais été le plan de Dieu. Le salut est comme un fleuve qui, à partir de la justification, passe par la sanctification et aboutit à la glorification. "Nous savons, du reste, que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein. Car ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l'image de son Fils, afin que son Fils soit le premier-né de beaucoup de frères. Et ceux qu'il a prédestinés, il les a aussi appelés, et ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés; et ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés." (Romains 8:28-30) Les temps de verbe utilisés montrent clairement que le salut est semblable à un courant d'eau ininterrompu.

Voici d'autres textes qui illustrent cette vérité: "Etant donc justifiés par la foi (dans le passé), nous avons la paix (dans le présent) avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, à qui nous devons d'avoir eu par la foi accès à cette grâce, dans laquelle nous demeurons fermes, et nous nous glorifions dans l'espérance de la gloire de Dieu. Bien plus, nous nous glorifions même des afflictions, sachant que l'affliction produit la persévérance, la persévérance la victoire dans l'épreuve, et cette victoire l'espérance. Or, l'espérance ne trompe point, parce que l'amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné." (Romains 5:1-5)
Citons encore les versets-clés de la première moitié de l'Epître aux Romains: "Car je n'ai point honte de l'Evangile: c'est la puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement, puis du Grec, parce qu'en lui est révélée la justice de Dieu par la foi et pour la foi; selon qu'il est écrit: Le juste vivra par la foi." (Romains 1:16-17) Dans ce passage, le mot "salut" ne contient pas seulement la notion de justification; il englobe le tout: justification, sanctification et glorification. "Parce qu'en lui est révélée la justice de Dieu par la foi et pour la foi." Il ne s'agit pas uniquement de l'acte de foi accompli "une fois pour toutes" pour notre justification, mais de la foi pour la foi "selon qu'il est écrit: Le juste vivra par la foi" - non pas seulement justifié par la foi, mais vivant par la foi.

L'aspect actuellement le plus important du salut pour nous chrétiens est la sanctification, car il s'agit de la vie présente. C'est précisément ce cheminement actuel, ce parcours de la vie chrétienne, de la vraie spiritualité, que nous abordons dans le présent ouvrage; notre étude est, en fait, l'étude de la sanctification d'après l'enseignement de l'Ecriture.

Le salut est un tout. Au moment où j'ai accepté Christ comme mon Sauveur, où j'ai été libéré de ma culpabilité, j'ai retrouvé ma véritable place, celle pour laquelle j'ai été créé au départ. L'homme a une raison d'être. En cette fin du XXe siècle, la question revient sans cesse: "Quelle est la raison d'être de l'homme, si toutefois il en existe une?" Notre siècle répond par un grand silence. Mais la Bible définit la raison d'être de l'homme: c'est d'aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa pensée. Il ne s'agit pas d'un amour vague ou "religieux" au sens moderne du terme, mais d'une véritable relation avec Dieu: une personne "finie", qui pense, agit et éprouve des sentiments, entre en contact avec l'infini - un Dieu infini mais personnel, avec qui il y a possibilité de communication. C'est la raison d'être de l'homme, même si la Chute nous l'a fait perdre de vue. Si donc j'accepte Christ comme mon Sauveur, la culpabilité qui faisait obstacle à ma relation avec Dieu et à la réalisation de ma raison d'être disparaît. J'occupe alors ma véritable place, celle pour laquelle j'ai a été créé. Ce n'est pas seulement dans quelque lointain futur, pendant le millénium du Christ ou au cours de l'éternité, mais bien maintenant que je reprends la place pour laquelle j'ai été créé.

J'entre aussitôt dans une relation nouvelle et vivante avec chacune des trois personnes de la Trinité. Premièrement, Dieu le Père devient mon père, d'où le terme théologique d'adoption: "Mais à tous ceux qui l'ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle (la Parole de Dieu) a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu." (Jean 1:12) Lorsque je reçois Christ, sur la base de son oeuvre parfaite, je deviens un enfant de Dieu. Seul Christ, la seconde personne de la Trinité est le Fils éternel de Dieu. Mais la Bible déclare, et cela devrait nous réjouir, que dès l'acceptation de Christ comme mon Sauveur, j'entre aussitôt dans une relation nouvelle avec le Père: je deviens son fils, et je réintègre ainsi la place pour laquelle j'ai été créé.

Deuxièmement, dès que j'accepte Christ comme mon Sauveur, j'entre aussitôt dans une relation nouvelle avec Dieu le Fils. Cette relation est décrite, en termes théologiques, comme notre union mystique avec Christ. L'Epître aux Ephésiens souligne à maintes et maintes reprises que lorsque nous acceptons Christ comme Sauveur, nous sommes "en" Christ. Romains 7:4 dépeint Christ comme notre Epoux, et nous comme son épouse. Selon Jean 15, Christ est le cep de vigne et nous sommes les sarments. Tous ces exemples servent à illustrer ou à rappeler l'union mystique de Christ avec le croyant. Et qui est ce Christ, avec lequel nous entrons en relation? Ce n'est pas l'enfant Jésus, ni le Christ qui a vécu sur la terre; ce n'est pas non plus le Christ qui a été cloué en croix, mais le Christ ressuscité, monté au ciel et glorifié.

Enfin, la Bible montre que nous entrons également dans une relation nouvelle avec la troisième personne de la Trinité, le Saint-Esprit. Dès notre justification, le Saint-Esprit vient habiter en nous. En Jean 14:16-17, juste avant sa mort, Jésus a fait une promesse qui s'est réalisée après sa résurrection et son ascension, au jour de la Pentecôte: "Et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre consolateur, afin qu'il demeure éternellement avec vous, l'Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu'il ne le voit point et ne le connaît point; mais vous, vous le connaissez, car il demeure avec vous, et il sera en vous." Ainsi, la relation qui existait alors va trouver un prolongement dans le futur. C'est ce que Jean exprime lorsqu'il précise que l'Esprit Saint n'était pas encore donné, parce que Christ n'avait pas encore été glorifié (Jean 7:39). L'Epître aux Romains montre également, avec clarté, qu'après avoir accepté Christ comme notre Sauveur, nous entrons immédiatement dans cette nouvelle relation avec le Saint-Esprit. Quiconque n'est pas en relation avec le Saint-Esprit, n'est pas chrétien: "Pour vous, vous ne vivez pas selon la chair, mais selon l'Esprit, si du moins l'Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il ne lui appartient pas." (Romains 8:9) Paul écrit aux chrétiens de Corinthe: "Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous?" (1 Corinthiens 3:16) Cette phrase a traversé les siècles et s'adresse à chaque homme qui a accepté Christ comme son Sauveur. Dès que je suis justifié, le Saint-Esprit vient demeurer en moi et j'entre dans cette nouvelle relation avec la troisième personne de la Trinité.

Bien plus, nous lisons cette promesse de Christ: "Et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre consolateur, afin qu'il demeure éternellement avec vous, l'Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu'il ne le voit point et ne le connaît point; mais vous, vous le connaissez, car il demeure avec vous, et il sera en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je viendrai à vous." (Jean 14:16-18) Nous ne sommes pas orphelins; Christ vient à nous par l'intermédiaire du Saint-Esprit qui habite en nous. La même idée est reprise au verset 23: "Nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui." En tenant compte du contexte, ce verset nous apprend que le Saint-Esprit qui habite chaque chrétien n'est pas uniquement l'agent de Christ, mais également l'agent du Père. Par conséquent, lorsque j'accepte Christ comme mon Sauveur, ma culpabilité est ôtée, le Saint-Esprit vient habiter en moi et je suis en communication avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit, la Trinité tout entière. Si je suis justifié, j'ai donc maintenant, dans la vie présente, une relation personnelle avec chacun des membres de la Trinité. Dieu le Père est mon Père; je suis uni au Fils, et le Saint-Esprit habite en moi. Loin d'être seulement une doctrine, je peux, dès maintenant, vivre cette communion.

Permettez-moi d'insister : le salut est un tout. Que ce soit dans son aspect passé, présent ou futur, le salut repose sur une base unique. Cette base n'est pas notre foi. Si nous faisons erreur à ce sujet, nous nous méprenons complètement. Jamais aucun homme ne sera justifié sur la base de sa foi. Le salut a, dans tous ses aspects, une seule base: l'œuvre historique et parfaite de Jésus-Christ sur la croix. La foi n'est que la main vide, le moyen qui nous permet de saisir le don gratuit de Dieu. La foi n'est pas un saut dans l'inconnu. C'est croire Dieu tout simplement; c'est cesser de qualifier Dieu de menteur et lui faire confiance. La foi est l'instrument, le comment de notre justification; mais ce "comment" concerne également tous les aspects du salut.

Considérez, par exemple, l'assurance du salut. La Bible est très claire à ce sujet: l'individu devenu chrétien a le droit de savoir qu'il est sauvé. Cette certitude du salut est l'un des grands bienfaits que Dieu nous accorde non seulement au moment de la conversion, mais également dans les moments difficiles, accablants de la vie, où les hautes vagues menacent de nous faire perdre pied psychologiquement ou spirituellement. Dans de tels moments, le chrétien peut être plein d'assurance. Son salut repose sur l'œuvre parfaite de Christ, qu'il ressente ou non la paix qui devrait être la sienne; et il aura de l'assurance dans la mesure où il fait confiance aux promesses de Dieu à ce moment-là.

La sanctification relève des mêmes principes. Elle est fondée sur l'œuvre parfaite de Christ et l'instrument qui nous permet de saisir ce que Dieu veut nous donner au moment présent, c'est la foi. Pour l'enfant de Dieu, le processus de sanctification commence au moment de sa justification et se poursuit depuis, instant après instant. La justification est acquise une fois pour toutes, au moment précis où, par la grâce de Dieu, j'accepte Christ comme mon Sauveur; mais la sanctification est une vie de foi vécue instant après instant. Sur ce point, l'existentialiste a raison de souligner que la vie humaine ne peut se vivre qu'un instant après l'autre.

"Car l'amour de Dieu consiste à garder ses commandements. Et ses commandements ne sont pas pénibles." (1 Jean 5:3) Est-ce bien vrai? Pensons-nous vraiment, au fond de nous-mêmes, que ses commandements ne sont pas pénibles? Je dois avouer que je les ai, moi-même, longtemps trouvés pénibles. Lorsque j'étais pasteur j'ai évité, pendant de nombreuses années, de prêcher sur ce verset, pour la simple raison que je ne le comprenais pas. Les commandements de Dieu m'étaient pénibles. Je pouvais à peine les supporter. Puis, je me suis aperçu un jour, en m'attaquant à la question, qu'il suffisait de regarder le contexte de ce passage: "Car l'amour de Dieu consiste à garder ses commandements. Et ses commandements ne sont pas pénibles, car tout ce qui est né de Dieu triomphe du monde." Si le verset s'arrêtait là, nous n'aurions pas l'explication du "comment". Heureusement Jean continue en précisant: "Et la victoire qui triomphe du monde, c'est notre foi." Une vie de foi et de confiance en Dieu, instant après instant, sur la base de l'œuvre parfaite de Christ, c'est "la victoire". Non pas notre propre victoire, mais la victoire de Christ, acquise pour nous sur la croix du calvaire, et concrétisée, dans nos vies, à chaque instant, par la foi.

On peut établir une comparaison entre la sanctification et l'assurance du salut. Une personne peut être sauvée et ne pas savoir qu'elle l'est, parce qu'elle ne croit pas à ce moment-là les promesses de Dieu et ne tend pas vers lui, instant après instant, les mains vides de la foi. De même, une personne peut passer à côté de tout ce que Dieu veut lui donner ici-bas en vue de sa sanctification, bien que Christ ait déjà tout acquis pour elle sur la croix. Soyons bien clairs: rien ne repose sur notre foi, mais sur l'œuvre parfaite de Christ; la foi, cependant, est l'instrument qui permet de recevoir de Dieu ce que Christ a acquis pour nous.

Le salut est donc la troisième expression de l'unité de l'enseignement biblique sur la vocation du chrétien dans le monde. Le salut est un ensemble; il est aussi comme un courant d'eau. Je suis devenu chrétien une fois pour toutes, sur la base de l'œuvre parfaite de Christ, par le moyen de la foi; c'est la justification. La vie chrétienne, la sanctification s'effectue sur la même base, mais instant après instant. Même base (l'œuvre de Christ) et même instrument (la foi): la différence est que l'une est accomplie une fois pour toutes et que l'autre s'effectue instant après instant. L'enseignement biblique présente une parfaite unité. Si nous essayons de vivre par notre propre force la vie chrétienne, nous ferons de douloureuses expériences, mais si nous la vivons de cette manière, non seulement nous servirons le Seigneur, mais au lieu de souffrir nous en ferons le sujet de notre louange. Voilà la différence. Le "comment" de la vie chrétienne, c'est la puissance du Seigneur crucifié et ressuscité, manifestée par l'action du Saint-Esprit qui habite en nous, au moyen de la foi, à chaque instant.

"Que le Dieu de l'espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi, pour que vous abondiez en espérance, par la puissance du Saint-Esprit !" (Romains 15:3) Voilà ce à quoi nous sommes appelés, par l'action du Saint-Esprit. Notre vocation n'est pas de servir Dieu n'importe comment, mais de connaître la joie et la paix en croyant.

 


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