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Les pratiques charismatiques à la lumière de la Bible

5 - La prophétie

Ce que certains charismatiques enseignent

Certains frères charismatiques enseignent que Dieu peut encore aujourd'hui parler directement à son peuple d'une manière prophétique. Dans les Églises, par lettre, dans des réunions de famille, de prière, ou dans de grands rassemblements, des hommes et des femmes peuvent se lever et dire "Ainsi parle l'Eternel..."

Les caractéristiques bibliques de la prophétie

A. Le prophète et la prophétie

1. La fonction de prophète

Ancien Testament

  • Connaissance surnaturelle 1 Chroniques 29.29 "Les actions du roi David, les premières et les dernières, sont écrites dans le livre de Samuel le voyant [ro'eh], dans le livre de Nathan, le prophète [nabî'], et dans le livre de Gad, le voyant [hozeh]"
  • Porte-parole Exode 7.1: L'Éternel dit à Moïse: Vois, je te fais Dieu pour Pharaon: et Aaron, ton frère, sera ton prophète.
  • Chargé d'une révélation: Amos 3.7 Ainsi le Seigneur, l'Eternel, ne fait rien sans avoir révélé son secret à ses serviteurs les prophètes.
  • Le terme est également utilisé pour les faux prophètes. On distingue d'ailleurs trois types de faux prophètes:
  • Ceux qui l'étaient de volonté délibérée, voir 1 Rois 13.18, Néh. 6.12, Jér 6.13.
  • Ceux qui s'étaient laissés séduire par des démons, voir 1 Rois 22.23, Jér. 23.13.
  • Ceux qui prenaient leur imagination pour prophétie, voir Jér. 5.13, Ezé 13.2-9.

Nouveau Testament

  • Je crois à l'identité de ministères entre les prophètes de l'Ancien Testament et ceux du Nouveau Testament.
  • Mêmes déclarations, cf. Actes 21.11 "Voici ce que dit le Saint Esprit"
  • La citation de Joël 3 par Pierre.
  • Le ministère de révélation des prophètes, cf. Eph 3.5.

2. Les paroles prophétiques

L'Ancien Testament

  • La prophétie ne vient pas que des "prophètes professionnels". Comparer ces deux versets:
  • Tout Israël, depuis Dan jusqu'à Beer-Schéba, reconnut que Samuel était établi prophète de l'Éternel. (1 Samuel 3.20)
  • Amos répondit à Amatsia: Je ne suis ni prophète, ni fils de prophète; mais je suis berger, et je cultive des sycomores. L'Éternel m'a pris derrière le troupeau, et l'Éternel m'a dit: Va, prophétise à mon peuple d'Israël. (Amos 7.14-15)
  • Pour déterminer la valeur d'une prophétie, on mesurait son contenu, et non la sincérité du messager. Plusieurs critères sont données dans la Loi:
  • L'exactitude doctrinale (même en présence de signes et prodiges) Deut. 13.2-4.
  • L'accomplissement précis de ce qui est annoncé Deut. 18.15-22.
  • Remarque: Peine de mort pour les faux prophètes. Ce ne sont pas les prophéties qui étaient effacées, mais les prophètes qui étaient retranchés.
  • C'est le résultat qui compte. Le résultat est exact à 100% s'il vient de Dieu, il n'est pas de Dieu s'il est erroné ne serait-ce que de 1%.

Le Nouveau Testament

  • Même chose que pour l'Ancien Testament. Les paroles prophétiques sont exactes. Plusieurs arguments sont donnés à l'encontre de cette affirmation:
  • 1 Cor 13.9: "car c'est partiellement que nous connaissons". Mais prophétiser "en partie" (trad. litt.), veut dire prophétiser "incomplètement", mais pas prophétiser "avec erreur". Chacune des parties est sans erreurs
  • 1 Cor. 14.3: "Celui qui prophétise, au contraire, parle aux hommes, les édifie, les exhorte et les console". Mais c'est confondre ce qu'une prophétie est de ce qu'elle fait.
  • 1 Cor. 14.29: "pour les prophètes, que 2 ou 3 parlent et que les autres jugent". Juger pas corriger. Il s'agit de la légitimité d'une prophétie (selon ce qu'elle disait de Christ, 1 Jean 4.1-3, et par comparaison avec le reste des Ecritures, 1 Pie 4.11).

Ainsi, une prophétie est une communication exacte de Dieu nous arrivant par un homme. Le prophète n'est pas intéressant en lui-même. C'est le fruit de son activité qui est intéressant.

La fin de la prophétie

A. Les arguments en faveur de la continuation

Certains charismatiques avancent deux arguments principaux:

  1. Les dons spirituels décrits en Rom 12.6-8; 1 Cor. 14.4-5; Eph 4.11-12. Voir dans les fichiers précédents la discussion sur la temporalité de certains dons.
  2. Joël 3, repris en Actes 2.16-21. MAIS:
  • Mais tous les signes de Joël et de Actes ne se sont pas réalisés (sang, feu, etc.). Pourquoi?
  • Voir aussi le contexte antérieur de Joël 3:
    • Au travers d'une situation immédiate, les bénédictions du millenium (cf. Ap. 20.1-10).
    • Les ennemis d'Israël auront été repoussés à jamais (Joël 2.20),
    • La malédiction du sol sera abolie (2.21-22, cf. Gen. 3.17-19),
    • La terre ne connaîtra pas de sécheresse et sera abondamment arrosée, garantissant des récoltes suffisantes (Joël 2.23).

Il s'agit donc de la restauration future d'Israël (et non du temps de l'Eglise):

  • Les indices tels que "mon peuple ne sera plus jamais dans la honte" répété deux fois ne peuvent être compris qu'à la lumière de la restauration future d'Israël (cf. Rom. 11.25-26, Es. 11.11, Jér. 30.17, Jér. 31.31, Os. 3.5, etc.), et à sa sécurité politico-militaire.
  • La référence au "Jour de l'Eternel", expression eschatologique, confirme la visée future de la prophétie (Joël 3.4). Cette expression est fréquemment reprise par les prophètes de l'Ancien Testament, pour décrire le jugement précédant l'avènement du règne terrestre du Christ (voir Es. 13.9; Am. 5.18; Abd. 1.15; Soph. 1.14, Zach. 14.1, Mal. 3.5).
  • En comparant avec les informations de l'Apocalypse, nous pouvons conclure que le contexte antérieur à Joël 3 évoque les derniers moments précédant le règne terrestre du Christ.
  • Le chapitre 3 se comprend dès lors aisément: le peuple d'Israël, lors de sa conversion, bénéficiera d'une effusion générale de l'Esprit. Tous prendront réellement place au sein de l'alliance promise (Jér. 31.31; Ezé. 36.22-38).
  • Pierre voit dans la Pentecôte un accomplissement partiel et une anticipation du réveil spirituel national d'Israël. Les "derniers jours" (ou "dernière heure", 1 Jean 2.18) définissent bien l'ère de l'Eglise (comp. Héb. 1.2), mais la prophétie de Joël ne peut s'y appliquer pleinement, tant par l'absence des signes évoqués, que par la conversion partielle du peuple Juif. A la Pentecôte, l'Esprit n'a pas été répandu sur "toute chair". Il y avait toujours des persécutions et des opposants au Christ au sein de la nation. (Toute chair = autant les "prophètes professionnels" que les gens les plus simples.) Mais un jour, le réveil spirituel aura une telle ampleur, que tous se tourneront vers le Christ ! Paul envisage la gloire de ces moments: "or, si leur chute a été la richesse du monde, et leur défaite la richesse des païens, combien plus en sera-t-il ainsi de leur complet relèvement" (Rom. 11.12).
  • La prophétie de Joël a connu un heureux prélude, anticipant une heure glorieuse pour Israël, aujourd'hui mis à l'écart.
  • Ceux qui avancent que Joël concerne l'Eglise, sont dans l'embarras, pour déterminer ce qui est pour l'Eglise et ce qui n'est pas pour l'Eglise...
  • Ce texte ne peut donc, à lui seul, être légitimement utilisé pour dire que la prophétie continuera...

B. Les arguments en faveur de la cessation

  1. Ephésiens 2.20: "Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre angulaire".
  • Le temps du verbe implique une action ponctuelle. Ce verbe est au passif et ainsi, nous le subissons!
  • Fondement: fondation, pierre de fondation.
  • Dieu déclare que l'Eglise se bâtit sur le fondement des apôtres et des prophètes. On ne peut changer une fondation (1 Cor. 3.11). Il ne saurait y avoir de nouveaux prophètes sans avoir une nouvelle Eglise, un nouveau programme, une nouvelle économie.
  • C'est précisément dans le contexte d'un changement de dispensations qu'est annoncée la venue de deux prophètes (Ap. 11.1-14, voir Zach. 4). Cela n'impliquerait-t-il pas qu'entre les vrais prophètes fondateurs de l'Eglise et les vrais prophètes de la Tribulation, ne se lèveront que des faux prophètes?
  1. Jude 3: "Bien aimés, comme je désirais vivement vous écrire au sujet de notre salut commun, je me suis senti obligé de le faire, afin de vous exhorter à combattre pour la foi qui a été transmise aux saints une fois pour toutes."
  • apax, "une seule fois" (2 Cor. 11.25, 1 Thess 2.18), "une fois pour toutes" (Héb. 6.4, 10.2). Ce terme montre le côté ponctuel de la révélation. La foi nous a été donnée, on ne peut la transformer, on doit la défendre.
  • paradotheise, Aoriste passif, confirme que le contenu est transmis une fois pour toute. En dehors de ceux que Dieu a directement autorisé à le faire.
  1. Apocalypse 22.18-19 "Je l'atteste à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre: Si quelqu'un y ajoute, Dieu ajoutera à son sort les plaies décrites dans ce livre. Et si quelqu'un retranche des paroles du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de l'arbre de vie et de la ville sainte, décrits dans ce livre."
  • L'Apocalypse est un livre essentiellement prophétique. Son titre ("révélation") et son contenu (cf. Ap. 1.3), Ap. 19.10, etc.) font de cet ouvrage le "chapeau prophétique" de la Parole. De quels dangers Jésus veut-il avertir les lecteurs?
  • Veut-il mettre en garde les futurs copistes, afin qu'ils prennent soin de leur travail? Le contexte se prête mal à cette interprétation. L'exhortation s'applique à tout lecteur. Veut-il avertir ceux qui chercheraient à transformer le texte de l'Apocalypse à leur profit? La Bête sera probablement gênée par les prophéties qui la concernent. Peut-être cet avertissement servira-t-il surtout aux gens de la tribulation. Mais quel bénéfice le chrétien de la fin du premier siècle pouvait-il tirer d'un tel avertissement?
  • Si "ajouter" et "retrancher" s'appliquent au sens, alors Jésus exige que l'on prenne garde à l'interprétation de ce qu'il vient de révéler. Toute altération sur le sens des paroles induirait un jugement très grave pour son auteur. Mais cela ne semble pas être la bonne piste. Jésus encourage les lecteurs à "travailler" ce texte (1.3), comme s'il comprenait la difficulté de bien le comprendre. Les mises en garde adressées à ceux qui enseignent les Ecritures (cf. Jac. 3.1) sont bien moins conséquentes que celle de ces versets de l'Apocalypse.
  • Si "ajouter" et "retrancher" s'appliquent au contenu, alors Jésus décrète la fin de la révélation prophétique. Par l'ultime révélation qu'il a confié à Jean, Jésus demande que l'Eglise n'ajoute plus au fondement qu'elle a maintenant reçu. Presque tous les apôtres étaient morts. L'Eglise devait lutter contre la prolifération de fausses prophéties et la montée du gnosticisme. Il devenait impératif de couper court à toute tentation d'ajouter quoi que ce soit à la Parole de Dieu. La voix des prophètes devait s'éteindre, demeurer silencieuse, jusqu'au jour où une nouvelle dispensation la rendrait nécessaire.
  • La manière dont se termine le livre de l'Apocalypse implique la fin, l'arrêt du ministère de révélation...
  1. La suffisance des Ecritures
  • Le chrétien est rendu apte à toute oeuvre bonne par les Ecritures (2 Tim. 3.17). Elles sont suffisantes pour équiper toute personne et la conduire à la maturité (2 Tim. 3.16). Une parole fraîche d'aujourd'hui ne saurait être plus "vivante et efficace, plus acérée qu'aucune épée à double tranchant ; [pénétrant] jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit, des jointures et des moelles" comme le fait la Parole de Dieu, qui est "juge des sentiments et des pensées du coeur" (Héb. 4.12).
  • Dire que Dieu révèle aujourd'hui sa Parole, signifie que Sa Parole n'est pas suffisante pour son oeuvre...

C. Remarques tirées de l'Histoire de l'Eglise

  • Déjà aux temps bibliques, le ton se durcit. On observe une nette progression des mises en garde à l'égard des faux prophètes (voir 1 Cor. 12.3 ; Act. 20.29 ; 1 Tim. 4.1, 1 Jean 4.1-4, Ap. 2.12-17 puis Ap. 22.18-19).
  • La crainte au sein de l'Eglise apostolique - cf. 1 Pie 4.9-11.
  • Les régulations assez strictes du Didachê (document d'église datant du début du IIe siècle).
  • Le Berger d'Hermas ne fait pas mention des prophètes
  • Le rejet du Montanisme et de ses prétentions:

"Il y a, dit-on, en Mysie, sur la frontière de Phrygie, un bourg appelé Ardabau: c'est là, à ce qu'on raconte, que tout d'abord un des nouveaux fidèles, nommés Montan ... ouvrit à l'ennemi l'accès de son âme par suite d'une ambition démesurée des premières places. Agité par l'esprit (du mal), il devint soudain comme possédé et pris de fausse extase et il se mit dans ses transports, à parler, à prononcer des mots étranges et à prophétiser d'une manière tout à fait contraire à l'usage traditionnel que garde la succession ancienne de l'Eglise. Parmi ceux qui furent alors les auditeurs de ces discours illégitimes, les uns, importunés par lui comme par un énergumène, un démoniaque, un possédé de l'esprit d'erreur, qui troublait les foules, le blâmaient et l'empêchaient de parler, se souvenant de l'explication du Seigneur et de sa menace touchant la vigilance avec laquelle il faut se garder de la venue des faux prophètes. Les autres au contraire, comme exaltés par l'Esprit Saint et le charisme prophétique, et surtout enflés d'orgueil et oublieux de l'explication du Seigneur, provoquaient l'esprit insensé, flatteur et séducteur de peuple, charmés et trompés par lui au point qu'on ne pouvait plus les obliger à se taire.
Par quelque artifice, ou plutôt par ces détestables procédés, le diable machinait la perte des indociles et se faisait honorer par eux contre toute raison. Il excitait et échauffait leur esprit endormi déjà loin de la vraie foi. Il suscita encore deux femmes qu'il remplit d'un esprit bâtard, en sorte qu'elles se mirent à parler à contresens et à contretemps, d'une façon étrange, semblablement à l'homme. Et cet esprit proclamait bienheureux ceux qui se réjouissaient et se glorifiaient en lui et il les exaltait par la grandeur de ses promesses; mais quelquefois aussi, il leur adressait en face des reproches très justes et très dignes de créance, afin de paraître capable de reprendre ; mais peu nombreux étaient parmi les Phrygiens les dupes de cette feinte. L'esprit d'arrogance enseignait encore à blasphémer l'Eglise catholique tout entière qui est répandue sous le ciel, parce que sa fausse prophétie ne recevait auprès d'elle ni honneur ni accès.
En effet, les fidèles d'Asie se réunirent souvent à cette fin en de nombreux endroits de l'Asie; ils examinèrent les discours récents et montrèrent qu'ils étaient profanes; et après avoir condamné l'hérésie, ils chassèrent ainsi de l'Eglise ses sectateurs et les retranchèrent de la communion."
(Eusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, (trad. par Gustave Bardy), Livre V, chap. XVI.7-10.)

Les conceptions modernes
  • L'Eglise catholique, voir le livre "La foi charismatique", par Florent Varak, éditions CLE, p. 108-109, N° 1 à 3
  • Pour justifier l'erreur au sein de leur ministère, certains sont obligés d'inventer la notion de prophétie non-inspirée. Mais Tite 1.2 nous parle d'un "Dieu qui ne ment pas"!
  • Tout chrétien est prophète, dans le sens de représentant ou de porte-parole de la Parole de Dieu.
  • Par son union avec Christ, le croyant reçoit un triple office similaire à celui de Jésus. A l'instar de son Maître, le chrétien est prêtre (Ap. 1.6; 1 Pie. 2.9, roi (2 Tim. 2.12, Ap. 20.6, Ap. 22.5, et prophète (2 Cor. 5.20; Matt. 28.16-20).
  • Avec Moïse, combien nous souhaitons que tout enfant de Dieu soit appelé à cette tâche (Nb. 11.29)! Mais dans son sens habituel, le don de prophète est donné à l'Eglise pour un objectif très spécial.
  • Toutefois, nous avons raison de répondre non à la question de départ: < Dieu ne parle plus directement à son peuple.
  • Dieu communique à notre esprit un certain nombre d'informations, qui doivent être filtrées par la Parole, et par le conseil des autres. Sinon, nous risquons d'être séduit, et de conduire d'autres à la dérive.

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