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Jésus était juif
Pourquoi le Messie a-t-il dû mourir?

Dr Arnold G. Fruchtenbaum

Comme le concept d'un Messie souffrant et mourant est très étranger au judaïsme moderne, alors qu'il lui était pourtant familier autrefois, nous devons répondre à la question: Pourquoi le Messie dut-il mourir?
Une autre question vient se greffer dessus: Quel est le moyen de la rédemption?

S'il est un thème qui parcourt toutes les Ecritures, c'est bien celui de la rédemption par le sang.

Dans l'Ancien Testament

La rédemption est devenue nécessaire à partir du moment où le péché est entré dans le monde et a séparé l'homme de Dieu. Lorsqu'Adam et Eve commirent leur premier acte de désobéissance, le péché est entré en eux et les a coupés de Dieu. Depuis cet instant, le sang a été le seul moyen de jeter un pont entre Dieu et l'homme pour que celui-ci puisse franchir le fossé creusé entre eux. C'est ce qu'on appelle la rédemption. Dans l'histoire des relations entre Dieu et son peuple, la rédemption a toujours été opérée par le sang.

La notion de rédemption par le sang apparaît dans l'Ecriture en même temps que le péché. Aussi longtemps qu'il n'y avait pas de péché, il n'était pas besoin de sang rédempteur. La Genèse nous apprend que dès que l'homme fut expulsé du jardin d'Eden, "L'Eternel Dieu fit à Adam et à sa femme des habits de peau, et il les en revêtit" (Ge 3. 21).

Les peaux en question étaient celles d'animaux. La nudité que le péché révélait devait être couverte. Mais pour cela, il fallut la mise à mort de plusieurs animaux; ainsi, pour la première fois dans l'histoire, du sang fut répandu. C'est de là qu'est tirée la racine du mot hébreu pour "expiation" qui signifie "couvrir".

Les fils du premier couple humain apprirent rapidement la nécessité du sang. A un moment donné, Abel et Caïn apportèrent leurs sacrifices devant Dieu. Caïn offrit les fruits de son travail dans les champs. Il s'agissait de légumes; ce sacrifice était non sanglant. Abel offrit un sacrifice sanglant de son troupeau. Après avoir examiné ces deux types d'offrandes, Dieu rejeta celui de Caïn et accepta celui d'Abel. La leçon est évidente: ce n'est pas à l'homme de choisir le moyen par lequel il doit s'approcher de Dieu. L'homme a péché, il a offensé Dieu; c'est donc Dieu qui doit pardonner. C'est à Dieu d'indiquer à l'homme coupable le moyen qu'il a choisi pour lui pardonner son péché, et ce moyen, c'est le sang. Caïn avait fixé de sa propre autorité le moyen par lequel il comptait s'approcher de Dieu, mais il fut repoussé. Abel se conforma aux indications divines et fut accepté.

En parcourant l'histoire biblique de la Genèse, nous constatons que tous ceux en qui Dieu trouva du plaisir furent ceux qui s'approchèrent de lui au moyen du sang. Dès qu'il sortit de l'arche, Noé offrit des sacrifices sanglants. Il fut imité par les grands hommes de l'histoire juive, Abraham, Isaac, Jacob, qui tous veillèrent à s'approcher de Dieu par le moyen du sang.

Dans les 613 mitzvot (commandements) de la Loi que Moïse reçut au Mont Sinaï, le sang comme moyen de rédemption est constamment présent. Lévitique 17:11 énonce la raison d'être des sacrifices sanglants: "Car la vie de la chair est dans le sang. Je vous l'ai donné sur l'autel, afin qu'il serve d'expiation pour vos âmes, car c'est par la vie que le sang fait l'expiation."

Il est facile de constater que toute la Loi gravite autour de cette affirmation. Dans la Loi, Dieu avait donné des commandements auxquels il fallait obéir. La désobéissance était un péché. Lorsqu'il y avait désobéissance, la faute ne pouvait être expiée que par le sang. Le livre du Lévitique commence par donner de nombreux détails sur les différents types de sacrifices sanglants. Tous les sacrifices poursuivaient le même but : rétablir pour le Juif sa communion avec Dieu. Les sept fêtes juives: la fête de la Pâque, celles des pains sans levain, des prémices, de la Pentecôte, des trompettes retentissantes, de la grande expiation et des tabernacles, s'accompagnaient toutes d'effusion de sang. Le chapitre 16 du Lévitique donne des instructions précises sur la manière de répandre le sang lors de la cérémonie du Yom Kippur, pour l'expiation des péchés du peuple juif. Le tabernacle et le temple furent construits de manière à permettre l'effusion du sang et de le rendre efficace pour l'expiation des péchés de la nation. Un seul homme, le souverain sacrificateur, avait le droit d'entrer dans le Saint des saints, qui abritait la présence glorieuse de Dieu, la Shekinah, et cela une fois par an seulement. Encore fallait-il qu'il le fasse avec le sang des sacrifices du Yom Kippur, et qu'il asperge de ce sang l'arche de l'alliance qui contenait les tables de la Loi:

  • "Il égorgera le bouc expiatoire pour le peuple, et il en portera le sang au-delà du voile. Il fera avec ce sang comme il a fait avec le sang du taureau, il en fera l'aspersion sur le propitiatoire et devant le propitiatoire. C'est ainsi qu'il fera l'expiation pour le sanctuaire à cause des impuretés des enfants d'Israël et de toutes les transgressions par lesquelles ils ont péché. Il fera de même pour la tente d'assignation, qui est avec eux au milieu de leurs impuretés. Il n'y aura personne dans la tente d'assignation lorsqu'il entrera pour faire l'expiation dans le sanctuaire jusqu'à ce qu'il en sorte. Il fera l'expiation pour lui et pour sa maison, et pour toute l'assemblée d'Israël." (Lé 16.15-17).

Le principe du sang qu'il fallait répandre traverse toute l'histoire de l'Ancien Testament. Mais le fait de devoir offrir des sacrifices sanglants devint une charge pour le peuple. Il fallait les répéter année après année, et se rendre pour cela au temple de Jérusalem. Les Juifs qui habitaient à des dizaines de kilomètres de Jérusalem trouvaient pénible de devoir chaque année monter au temple pour offrir leurs sacrifices au Seigneur. Ils étaient peu nombreux – ceux que les prophètes nomment le Reste – à aimer suffisamment Dieu et sa Loi pour continuer à offrir des sacrifices malgré la charge que cela constituait. D'autres Juifs érigèrent des autels sur les montagnes et les collines plus près de chez eux et offrirent là leurs sacrifices. Mais les sacrifices offerts sur des autels rivaux n'opéraient pas l'expiation; les prophètes de Dieu s'insurgèrent contre cette déviation de la Loi divine, et la condamnèrent vigoureusement. Beaucoup avaient oublié la leçon tirée de l'expérience de Caïn, à savoir que pour s'approcher de Dieu et obtenir son pardon, ce n'est pas à l'homme de fixer les conditions, mais à Dieu.

C'est Esaïe qui, le premier, a permis d'espérer qu'un jour, ce fardeau annuel des sacrifices à présenter à Dieu serait ôté. Dans Esaïe 53, Dieu lui-même annonce que le Serviteur Souffrant, le Messie, serait le sacrifice pour le péché:

  • "Il a plu à l'Eternel de le briser par la souffrance... Après avoir livré sa vie en sacrifice pour le péché, il verra une postérité et prolongera ses jours; et l'oeuvre de l'Eternel prospérera entre ses mains. A cause du travail de son âme, il rassasiera ses regards; par sa connaissance mon serviteur juste justifiera beaucoup d'hommes, et il se chargera de leurs iniquités." (Es 53.10-11).

Ainsi, nous découvrons pour quelle raison le Messie devait mourir: offrir une fois pour toutes le sacrifice sanglant nécessaire à l'expiation des péchés. Dorénavant, les Juifs n'auraient plus à répéter chaque année les mêmes sacrifices. Tout ce qu'ils auraient à faire serait d'accepter la mort du Messie en leur faveur, et leurs péchés leur seraient pardonnés. Comme le sang était le moyen de la rédemption, il fallait que le Messie meure pour que son sang fasse l'expiation des péchés.

Dans le Nouveau Testament

La lettre aux Hébreux est pour le Nouveau Testament ce que le Lévitique est pour l'Ancien. Pour comprendre le contenu de l'épître aux Hébreux, il faut d'abord comprendre l'enseignement du Lévitique. De même que Lé 17.11 est le verset central autour duquel toute la Loi gravite, la lettre aux Hébreux a, elle aussi, un passage clé: "Et presque tout, d'après la loi, est purifié avec du sang, et sans effusion de sang il n'y a pas de pardon" (9.22).

La lettre aux Hébreux a été écrite par un chrétien hébreu à un ensemble d'assemblées juives chrétiennes d'Israël. Elle reprend le thème principal du Lévitique et la prophétie d'Esaïe pour établir la supériorité du sacrifice consenti par le Messie. De nombreux passages le montrent, par exemple Hé 2.16-18:

  • "Car assurément ce n'est pas à des anges qu'il vient en aide, mais c'est à la postérité d'Abraham. En conséquence, il a dû être rendu semblable en toutes choses à ses frères, afin qu'il soit un souverain sacrificateur miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour faire l'expiation des péchés du peuple; car, du fait qu'il a souffert lui-même et qu'il a été tenté, il peut secourir ceux qui sont tentés."

Ce passage montre clairement que le Messie est venu en tant que Juif et qu'il a connu toutes les difficultés que peut connaître un Juif; il les a assumées afin de devenir un souverain sacrificateur miséricordieux et compatissant.

  • Hébreux 4.14-15 est un autre passage clé:
    "Ainsi, puisque nous avons un grand souverain sacrificateur qui a traversé les cieux, Jésus, le Fils de Dieu, demeurons fermes dans la foi que nous professons. Car nous n'avons pas un souverain sacrificateur qui ne puisse compatir à nos faiblesses; au contraire, il a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre de péché."

Ces versets développent l'idée que Jésus est un souverain sacrificateur compatissant parce qu'il comprend parfaitement les problèmes que rencontre tout homme, les ayant lui-même connus.

  • Citons encore Hébreux 7.22-25:
    "Jésus est par cela même le garant d'une alliance plus excellente. De plus, il y a eu des sacrificateurs en grand nombre, parce que la mort les empêchait d'être permanents. Mais lui, parce qu'il demeure éternellement, possède un sacerdoce qui n'est pas transmissible. C'est aussi pour cela qu'il peut sauver parfaitement ceux qui s'approchent de Dieu par lui, étant toujours vivant pour intercéder en leur faveur."

La supériorité du sacerdoce de Christ repose sur le fait que tous les autres sacrificateurs étaient mortels. Un souverain sacrificateur entrait en fonction, mais tôt ou tard il mourrait; un autre devait être choisi pour prendre sa succession, et ainsi de suite. Le cycle de la vie et de la mort présentait un inconvénient certain pour l'ancien sacerdoce. Comme Christ est un souverain sacrificateur qui demeure éternellement, son sacerdoce est supérieur au sacerdoce lévitique. En effet Jésus est ressuscité des morts; en vertu de cette résurrection, il demeure souverain sacrificateur à toujours.

Voici encore un autre passage qui révèle les lacunes du sacerdoce lévitique:

  • "Il nous convenait, en effet, d'avoir un souverain sacrificateur comme lui, saint, innocent, sans tâche, séparé des pécheurs, et plus élevé que les cieux, qui n'a pas besoin, comme les autres sacrificateurs, d'offrir chaque jour des sacrifices, d'abord pour ses propres péchés, ensuite pour ceux du peuple, car ceci il l'a fait une fois pour toutes en s'offrant lui- même." (Hé 7.26-27).

Ce passage rappelle que dans l'Ancien Testament, les sacrifices devaient être offerts jour après jour, année après année. Le Messie, lui, serait le sacrifice offert une fois pour toutes. C'est effectivement ce qui s'est produit avec Jésus. Il a répandu son sang en expiation pour le péché. En outre, dans le sacerdoce lévitique, le souverain sacrificateur devrait offrir du sang pour expier ses propres péchés avant d'en faire l'aspersion pour expier les péchés du peuple. Comme Jésus était sans péché, il n'a pas eu besoin d'offrir un sacrifice d'expiation pour ses propres péchés; son sang opère l'expiation pour tous ceux qui acceptent personnellement son sacrifice.

La supériorité du sacrifice de Christ sur tous les sacrifices antérieurs est encore mise en relief dans Hébreux 9.11-15:

  • "Mais Christ est venu comme souverain sacrificateur des biens à venir; il a traversé le tabernacle plus grand et plus parfait, qui n'est pas construit de main d'homme, c'est-à-dire qui n'est pas de cette création; et il est entré une fois pour toutes dans le lieu très saint, non avec le sang des boucs et des veaux, mais avec son propre sang, ayant obtenu une rédemption éternelle. Car si le sang des taureaux et des boucs, et la cendre d'une vache répandue sur ceux qui sont souillés sanctifient et procurent la pureté de la chair, combien plus le sang de Christ, qui, par l'Esprit éternel, s'est offert lui-même sans tache à Dieu, purifiera-t-il votre conscience des oeuvres mortes, afin que vous serviez le Dieu vivant! Et c'est pour cela qu'il est le médiateur d'une nouvelle alliance, afin que, la mort étant intervenue pour le rachat des transgressions commises sous la première alliance, ceux qui ont été appelés reçoivent l'héritage éternel qui leur a été promis."

Contrairement aux sacrifices d'animaux, le sacrifice de Jésus devait procurer la rédemption éternelle et non une simple expiation passagère. De plus, même après avoir offert des animaux en sacrifice, les Juifs conservaient la conscience de leurs péchés. En revanche, la foi dans le sacrifice de Jésus purifie complètement et libère la conscience du souvenir accablant des péchés commis.

Ceci est confirmé par Hébreux 9.28: "De même Christ, qui s'est offert une seule fois pour porter les péchés de beaucoup d'hommes, apparaîtra sans péché une seconde fois à ceux qui l'attendent pour leur salut."

Ce verset souligne bien ce double aspect de l'oeuvre du Messie. Jésus est venu une première fois s'offrir en sacrifice pour le péché du peuple, conformément à la prophétie d'Esaïe relative au Serviteur Souffrant. Le Serviteur Souffrant devait porter les péchés de beaucoup d'hommes; Jésus l'a fait par sa mort. Mais ce verset affirme aussi que Jésus reviendra une seconde fois dans un but différent. La première fois, il venait mourir pour le péché. La raison de sa deuxième venue sera d'instaurer son règne messianique.

  • Hébreux 10.1-4 fait ressortir le contraste entre les sacrifices d'animaux et le sacrifice sanglant de Jésus:
    "En effet, la loi qui possède une ombre des biens à venir, et non l'exacte représentation des choses, ne peut jamais, par les mêmes sacrifices qu'on offre perpétuellement chaque année, amener les assistants à la perfection. Autrement, n'aurait-on pas cessé de les offrir, puisque ceux qui rendent le culte, étant une fois purifiés, n'auraient plus eu aucune conscience de leurs péchés? Mais le souvenir des péchés est renouvelé chaque année par ces sacrifices; car il est impossible que le sang des taureaux et des boucs ôte les péchés."

Les sacrifices d'animaux devaient être répétés chaque année. Ils procuraient une expiation temporaire, mais jamais le pardon définitif des péchés. Au contraire, les sacrifices annuels servaient à entretenir chez le Juif le souvenir de ses péchés; il savait qu'il devrait de nouveau offrir des sacrifices l'année suivante. Il restait toujours conscient de ses péchés. Mais le sacrifice de Jésus n'a pas besoin d'être renouvelé. En acceptant ce sacrifice, nous obtenons non une expiation passagère, mais un pardon durable. Si nous acceptons personnellement la mort substitutive de Jésus à cause de nos péchés, rien n'entretient le souvenir de nos fautes; nous recevons une purification définitive et complète. C'est pourquoi le sacrifice de Jésus est supérieur à tous les sacrifices d'animaux dans l'ancien système.

  • Citons un dernier passage:
    "C'est en vertu de cette volonté que nous sommes sanctifiés, par l'offrande du corps de Jésus-Christ, une fois pour toutes. Et tandis que tout souverain sacrificateur fait chaque jour le service et offre souvent les mêmes sacrifices, qui ne peuvent jamais ôter les péchés, lui, après avoir offert un seul sacrifice pour les péchés, s'est assis pour toujours à la droite de Dieu; il attend désormais que ses ennemis soient devenus son marchepied. Car par une seule offrande, il a amené à la perfection pour toujours ceux qui sont sanctifiés." (Hé 10.10-14).

Ce texte rappelle lui aussi que le souverain sacrificateur devait offrir journellement des sacrifices qui n'étaient pas efficaces. Ils apparaissent donc comme le type même d'une oeuvre inachevée. Mais Jésus, qui s'est offert lui-même en sacrifice une fois pour toutes, représente l'oeuvre parfaitement accomplie, puisqu'il est désormais assis à la droite de Dieu. Comme nous l'avons déjà vu, les sacrifices d'animaux procuraient une expiation valable un an, mais ne pouvaient jamais ôter les péchés de façon définitive. Ceux qui acceptent le sacrifice de Jésus sont rendus parfaits pour toujours; leurs péchés sont définitivement ôtés.

Conclusion

L'Ancien et le Nouveau Testaments présentent le sang comme seul moyen de rédemption et révèlent que le sacrifice sanglant dont l'efficacité serait permanente serait celui du Messie. C'est pour cette raison que le Messie devait mourir d'après l'Ancien Testament. C'est pourquoi Jésus mourut effectivement, d'après le Nouveau Testament. Le Nouveau Testament ne s'intéresse pas vraiment à l'identité de celui qui a tué Jésus, puisque le Messie devait mourir. Cette question est devenue brûlante beaucoup plus tard, lorsque les antisémites ont cherché des raisons justifiant les persécutions contre les Juifs. La grande préoccupation du Nouveau Testament est de voir les hommes et les femmes accepter personnellement le sacrifice expiatoire de Jésus.

 


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