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Histoire vraie de Sebti 16

La voiture suivie

– Alors! Bien passé, ce camp? demande Jacques, jeune instituteur qui conduit la voiture de son père.
– Fantastique! répond joyeusement Sebti. Surtout la course au glacier.
– Et celle de la Cime des Fours, avec la glissade sur le névé! Tu te rappelles, Mohamed? ajoute Zin en éclatant de rire.
– Ah, oui! quelle descente, sur mon imper!

Chez les trois garçons, c'est le même enthousiasme. Aussi Jacques, arrivé de Suisse, est-il heureux d'assurer leur transport au retour du camp.
– On va donc commencer par déposer Mohamed à la gare de Perrache. Il y prendra son train pour Saint-Etienne. Ensuite, je vous ramènerai les deux à Saint-Priest, comme convenu. Ainsi je ferai la connaissance de vos parents.
– On aura bien des choses à leur raconter!
– Mais au fait, dit Jacques quelques heures plus tard quand la voiture arrive à Lyon, quelle direction prendre pour la gare de Perrache?
– Alors ça... – Moi, je ne sais pas! ajoute Mohamed. On peut demander à quelqu'un...
– Bonne idée! Arrêtons-nous près de cette Dauphine.
– Dites, Monsieur, s'il vous plaît, par où faut-il passer pour la gare de Perrache?
– J'y vais justement! Vous n'avez qu'à me suivre!
– D'accord. C'est très gentil!

Soulagé d'être guidé dans cette ville qu'il ne connaît pas, Jacques ferme la fenêtre, et démarre.
– Ouf! un souci de moins. Surtout, ne nous laissons pas distancer ! Pendant cinq bonnes minutes, les deux voitures roulent sans problème. Mais... voyez-vous cette intersection, à une cinquantaine de mètres? Et avez-vous remarqué que le feu vert vient de passer à l'orange? Vite le conducteur de la Dauphine presse sur l'accélérateur. C'est son habitude, en pareil cas.

– Dommage! soupire Jacques qui fait tout un calcul en une fraction de seconde, il passe, et nous allons être bloqués! Comment le rattraper, ensuite? Mieux vaut accélérer, nous aussi. On a juste le temps!

Mais le premier conducteur se ravise, et tient le raisonnement inverse:
– Stupide! ils vont me perdre. Mieux vaut ne pas traverser le carrefour, et attendre avec eux !

Coup de frein de la Dauphine... coup de frein de la Taunus... crissement de pneus... BOUM! Bruit d'éclats de verre et de tôles froissées. Sebti, qui est assis à côté de Jacques, est précipité en avant. Sans la ceinture de sécurité, il passerait sûrement à travers le pare-brise. Mais, arrivant de derrière, c'est maintenant son frère Zin qui tombe sur lui. Ah ! quelle gymnastique, ensuite pâle et muet, Jacques sort de la voiture. Le conducteur de la Dauphine en fait autant. Il s'est montré serviable en proposant de guider les jeunes gens. Hélas. il a été bien imprudent en accélérant juste avant le carrefour, puis en freinant tout aussi énergiquement. Des dégâts, il y en a. Le châssis de la Dauphine est tout tordu. La carrosserie de la Taunus a souffert. Jacques devra prendre le train pour rentrer en Suisse.

Et que dira son père? De plus, la police s'en mêle. Jacques et les trois jeunes Algériens sont emmenés au poste. Contrôle de papiers, questions, explications, rapport... Que tout cela est compliqué!

Quelques heures plus tard, Sebti et Zin sont assis dans l'autobus qui les emmène à Saint-Priest.
– C'est bien ce qu'on nous avait dit au camp, souffle Sebti. Tu vois, les difficultés ne se font pas attendre!
– C'est vrai. Mais Dieu a protégé notre vie, Sebti ! Dis, tu te souviens du verset sur lequel le chef de camp a tellement insisté, hier soir?
– Oui. C'était: "Que l'Eternel te bénisse et qu'il te garde!"
– Tu vois, Sebti! Au camp, Dieu nous a bénis. Et aujourd'hui, nous avions bien besoin d'être gardés par lui. Malgré ce coup dur, nous pouvons être reconnaissants!
– Tu as raison, Zin. C'est à tous les instants qu'on a besoin de sa protection!

Cette protection te sera encore bien nécessaire dans quelques semaines, Sebti! Car un tout autre danger te guette, sans que tu t'en rendes compte.

Texte: Samuel Grandjean


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