La grâce, la foi, les œuvres…
Question:
La grâce, pour être accordée, a besoin de foi et la foi sans les oeuvres est morte; aussi faut-il les oeuvres de la foi pour que le pardon puisse être accordé, et c'est par exemple des dons et des observances de la loi de Moïse qui sont nécessaires.
Réponse:
Il me semble trouver plusieurs points à votre question. Mais qui se déduisent les uns des autres.
Je lis donc dans votre question, les affirmations suivantes :
1. l’impossibilité de recevoir la grâce sans avoir la foi.
2. la foi sans les œuvres est morte.
3. les œuvres demandées, au moins en partie, sont les dons et les observances de la loi de Moïse.
J’en déduis donc que la question que vous me posez est la suivante :
Est-il vrai que si je ne donne pas et si je n’observe pas la loi mosaïque, alors ma foi est morte. Je n’ai donc pas la foi et par conséquent la grâce et le salut ne peuvent m’être accordés ?
Enoncée ainsi, je répondrais à cette question par la négative: la Parole de Dieu ne transmet pas cet enseignement.
Donnons tout d’abord l’exemple d’une personne sauvée, sans avoir pu mettre en pratique les prescriptions de la loi et les dons: Au brigand sur la croix qui reconnaît en Lui le Fils de Dieu, Jésus promet qu’il sera avec lui dans le Paradis. Il est donc gracié et pardonné, sans avoir visiblement pratiqué ce qui est juste, selon ses propres termes. Mais examinons chacune de vos assertions à la lumière de la Parole de Dieu.
1. Dans votre première affirmation l’impossibilité de recevoir la grâce sans avoir la foi», j’imagine que vous la basez sur des textes comme
- Sans la foi il n’est pas possible de plaire à Dieu (Hébreux 11.6)
- Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle. (Jean 3.16).
Je vais commencer par définir les termes grâce et foi.
Premièrement, la grâce n’a besoin de rien pour être accordée, c’est un don gratuit et souverain de Dieu. En ce sens, elle est parfaitement inconditionnelle. Dieu nous offre son pardon et nous justifie en fonction de Son amour envers nous. Mais Dieu, étant parfaitement saint, ne peut laisser le péché impuni, sa Justice en serait bafouée. C’est pour cela qu’il a envoyé son Fils Jésus, Dieu le Fils, sur terre pour endosser la condamnation et la punition pour nos péchés. Jésus a donc accepté à la croix de porter nos péchés. Il est mort non seulement physiquement, mais aussi spirituellement en étant séparé de Dieu le Père. Il a accepté tout cela pour que nous puissions être graciés et ne pas subir la juste condamnation que nous méritions. C’est cela la bonne nouvelle (évangile veut dire bonne nouvelle) que Dieu nous envoie et qui avait été annoncée par les prophètes. Les textes affirmant cela très clairement sont nombreux, par exemple Esaïe 53, Ephésiens 2.4-9, Romains 5.8-11, Jean 3.16, etc.
Ephésiens 2.8-9: Car c'est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu. Ce n'est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie.
La résurrection de Jésus confirme que Dieu a accepté l’œuvre de Jésus et l’a rétabli dans sa gloire. Etant couvert par le sang de l’Agneau, nous sommes donc justifiés de nos fautes et acceptés comme enfants adoptés de Dieu.
Où donc intervient la foi dans ce processus ?
La grâce est gratuite et offerte inconditionnellement. Par contre, elle peut être refusée ou ignorée. C’est là qu’intervient la foi. A Nicodème, en Jean 3.16, Jésus dit que Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle.
Ce que Dieu nous demande, c’est que nous reconnaissions que nous sommes indignes face à Dieu, face à Sa Sainteté. C’est ce qu’affirme Paul dans l’épître aux Romains (3.23). La loi condamne tout homme, car aucun homme ne peut la réaliser parfaitement. Il nous faut donc de l’aide. Nous ne pouvons nous en sortir seuls. Et c’est ce constat que Dieu veut que nous fassions, nous devons reconnaître qu’à cause de nos péchés, sans l’œuvre de Jésus-Christ nous sommes perdus, condamnés à l’enfer, c’est-à-dire à passer l’éternité sans aucune relation avec Dieu.
La foi en Jésus consiste à accepter l’œuvre de Jésus à la croix pour soi personnellement.
Il est donc important de comprendre que ce n’est pas notre foi qui nous sauve, mais l’œuvre de Christ uniquement. Mais nous pouvons refuser ce don que Dieu nous fait.
Une image parlante est celle d’une personne qui est en train de se noyer et à qui est lancée une bouée. La personne doit croire que cette bouée va la sauver et s’y accrocher.
C’est pareil pour nous, nous devons nous accrocher aux promesses que Dieu nous fait de nous sauver au travers du sacrifice de Jésus sur la croix.
2. Votre deuxième affirmation «La foi sans les œuvres est morte» est clairement basée sur le texte de Jacques 2.20.
Est-ce que Jacques veut dire que ce sont les œuvres qui sauvent ? Non, car la foi est primordiale dans le texte de Jacques. Mais revenons à ce que nous disions à propos de la foi. Il ne s’agit pas de la foi en tant que telle, mais la foi en Jésus Christ, en sa divinité et en son œuvre salvatrice. Celle-ci comprend une reconnaissance de nos péchés, de notre acceptation du sacrifice de Jésus et de notre justification par sa résurrection. Si nous comprenons cela et si nous l’acceptons, cette foi ne peut que nous pousser à vouloir aimer Jésus, et au travers de Lui, Dieu le Père Lui-même. Cela nous pousse aussi à une reconnaissance profonde. Et ce sont ces deux moteurs (amour et reconnaissance) qui nous poussent à agir d’une manière qui plaise à Dieu et à pratiquer les œuvres qu’Il a préparées d’avance pour nous (Ep 2:10).
Ainsi l’acceptation de Jésus comme notre Sauveur, mais aussi comme notre Seigneur, nous pousse à lui faire plaisir, à lui obéir par amour. Or, Jésus nous dit dans Jean que l’aimer, c’est suivre ses commandements (Jean 14.15). On comprend mieux maintenant l’affirmation de Jacques. Si rien ne change dans la vie d’une personne qui reconnaît Jésus comme son Sauveur, c’est peut-être, voire certainement, que cette personne n’a pas compris, ni accepté réellement l’offre de Jésus. Car la comprendre doit nécessairement avoir des conséquences dans la vie de la personne.
Ce que Jacques nous dit, me semble-t-il, est que l’absence de conséquences visibles (d’œuvres) dans la vie d’une personne professant Dieu, peut laisser planer un doute sur sa compréhension correcte de l’identité de Jésus et son œuvre.
3. Voyons à quoi correspondent ces œuvres découlant de la foi en Jésus. Votre troisième affirmation étant: «Ces œuvres demandées sont les dons et les observances de la loi de Moïse qui doivent être suivies».
Il est vrai que Jésus a dit qu’il n’annulait aucun iota de la Loi, mais qu’il l’accomplissait. Et quand on l’interrogeait sur les plus grands commandements, sa réponse était «le premier commandement: Tu aimeras ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée et le second: tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Matthieu 22.37-39).
Le plus important est l’amour que nous devons à Dieu qui doit se manifester par une obéissance à Sa Parole.
Rappelons-nous tout d’abord qu’avant la mort et la résurrection de Jésus, le Saint-Esprit n’était pas en chaque croyant. Le croyant devait donc avoir un intermédiaire pour s’approcher de Dieu. Comme cela était demandé dans la loi mosaïque pour l’obtention du pardon, le sacrificateur devait amener le sang du sacrifice d’un agneau, mais celui-ci n’était que la préfiguration du sacrifice de l’Agneau de Dieu, Jésus-Christ.
La parole de Jésus venant accomplir la loi est donc claire et il semble évident que nous ne sommes plus tenu de sacrifier des agneaux pour nos péchés. Le sacrifice de Christ est achevé, il est ressuscité et par là, nous avons accès au Père, grâce au Saint-Esprit qui vient vivre en nous. Cette relation vivante entre l’enfant de Dieu et son Père céleste lui permet de comprendre ce que Celui-ci veut de son enfant, le moyen principal pour comprendre la volonté de Dieu étant sa Parole lue et comprise avec l’aide du Saint-Esprit, Dieu pouvant parfois se révéler autrement.
Les règles morales comme les Dix commandements restent évidemment valables, mais toutes les ordonnances sur la purification et la gestion du Temple qui étaient là pour nous rappeler notre séparation du Dieu très Saint n’ont plus lieu d’être, puisque la justification et la réconciliation ont eu lieu en Jésus (le voile du temple se déchirant à la mort de Jésus).
Concernant les règles alimentaires, l’épisode de Pierre ayant la vision de la nappe avant d’être envoyé chez Corneille, font penser que ces ordonnances pouvaient être abolies (Actes 10.9-16). Reste que si par motif de conscience, vous pensez plaire à Dieu en vous pliant à certaines de ces lois, vous pouvez tout-à-fait le faire, puisque votre motivation est de plaire à Dieu. En revanche, ces ordonnances ne sont plus obligatoires, selon l’enseignement du Nouveau Testament. Les dernières règles mosaïques étaient aussi liées à la gestion politique du peuple juif. Ainsi, elles avaient comme but précis de poser les lois sociales indispensables pour le peuple. Mais les chrétiens ne forment pas une entité politique, ils sont appelés à se soumettre aux lois du pays auquel ils appartiennent pour autant que ces lois ne contredisent pas les lois morales de Dieu.
Concernant les dons, il est certain que le croyant est appelé à user de générosité autant envers l’Église, qu’envers les gens qui l’entourent. En revanche, bien des lois mosaïques sur les dons relevaient de l’entretien des Lévites ou du Temple. Ils étaient liés à la vie dans le pays promis du peuple juif avant la venue de Jésus. Ainsi, sur le principe, la générosité est toujours valable et doit être pratiquée en se laissant diriger par l’Esprit, mais les ordonnances spécifiques ne sont plus nécessairement valables. En revanche, il est tout à fait possible de garder l’idée de dîme (10% du revenu) comme une indication d’un minimum à redonner à Dieu.
En résumé, l’esprit des lois mosaïques, en particulier les lois morales, doit être respecté, mais toutes les lois régissant la vie quotidienne du peuple juif en Canaan avant la venue de Christ, en particulier toutes les lois sacrificielles ne sont plus valables, puisque le sacrifice parfait, celui de Jésus, a eu lieu. Concernant les lois alimentaires, il semble aussi qu’elles n’aient plus une valeur aussi normative que durant l’Ancienne alliance. Pourquoi respecter cela ? Non pas parce que cela nous sauve, mais parce que nous voulons par amour et reconnaissance, faire plaisir à notre Père céleste en ressemblant toujours plus à notre frère aîné, Jésus.
Dans l’épître aux Galates, on trouve le fruit de l’Esprit qui découle de la foi de l’enfant de Dieu: «Mais le fruit de l'Esprit, c'est l'amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bénignité, la fidélité, la douceur, la tempérance» Galates 5.22. Ces attributs que le Saint-Esprit fait fructifier en nous ont pour conséquences les œuvres qui doivent caractériser la vie du croyant, mais ne sont pas à l’origine de la grâce.
En conclusion, à la question de départ: «Est-il vrai que si je ne donne pas et si je n’observe pas la loi mosaïque, alors ma foi est morte. Je n’ai donc pas la foi et donc, par conséquence, la grâce, et le salut, ne peuvent m’être accordés ?», la réponse biblique est heureusement: «non!».
D’autant plus qu’il existe un texte dans la Bible réfutant cette l’affirmation: Quand Paul reproche aux Galates de s’être écartés de la bonne nouvelle, il ne leur dit pas autre chose que ce que je viens de soumettre à votre réflexion. Les Galates voulaient ajouter à la foi en l’œuvre de Christ l’observance de certaines lois mosaïques (comme la circoncision ou certaines lois concernant la nourriture). Paul leur parle assez durement (cf Galates 1.3, 3.1, 5.2) puisqu’ils remettent en cause le fondement-même de la foi chrétienne: il souligne avec force que seul le sacrifice de Jésus-Christ nous sauve pour autant que, suite au travail du Saint-Esprit en nos cœurs, nous l’acceptions.
Pierre-Alain Cherix