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Histoire vraie de Sebti 2

Le poney

– Cours, Sebti! Si tu l'attrapes, il est à toi! Ah! les merveilleuses paroles! Elles remplissent encore les pensées de notre petit ami quand, le soir venu, il s'étend par terre sur sa natte. Pelotonné dans sa djellaba qui lui sert d'habit comme de pyjama, l'enfant se répète secrètement les paroles de son oncle: "Si tu l'attrapes, il est à toi!" Et ces mots sont encore sur ses lèvres quand Sebti glisse doucement dans le monde des rêves...

Dès son réveil, l'enfant pense au poney. "Si tu l'attrapes, il est à toi..." Un poney, c'est bien mieux qu'un mouton pour grimper sur son dos! Seulement, celui de l'oncle est encore très sauvage! Hier, l'enfant a couru, couru de toutes ses forces. Vingt fois, ses petites jambes ont fait tout ce qu'elles pouvaient. Vingt fois, celles du poney ont avancé plus vite!

– Quatre pattes, c'est mieux que deux! en a conclu l'enfant. Mais, je l'aurai quand même! Cette nouvelle journée doit être celle de la capture. Vite, le bol de café est avalé. Hop! Sebti est dehors! Qui cherche-t-il, à présent, dans les ruelles du douar? Saïd? Mustapha, Kamel? Ces jours, les petits galopins ne pensent qu'à leurs frondes pour viser les oiseaux. Heureusement qu'ils ratent souvent leur cible! Mais aujourd'hui, Sebti les laissera très volontiers jouer seuls. Il rôde près des maisons, puis s'en va vers les cèdres, et finit par grimper sur la colline pour observer de loin les alentours du douar. Là-bas, il reconnaît l'habitation de son oncle, avec le puits devant. Tout près, quelques moutons font comme de petits buissons blancs. Sebti voit même des poules, une femme qui porte sa cruche, deux ou trois bourricots. Mais, tout à coup, il l'aperçoit, lui. Alors, de si loin, l'enfant lui parle:
– Ah! te voilà, joli poney! Tu sais, tu es à moi si je t'attrapes. Allons, sois gentil, attends-moi, tu veux? Nous serons bons amis, tu verras! Je t'ai repéré, tout là-bas. Eh bien... je vais descendre. Et je ferai un très grand tour pour arriver vers toi, tout doucement par derrière! Alors commence la longue marche d'approche. Lentement, très lentement, l'immense cercle se resserre tandis que Sebti fait mine de flâner. Pour bien jouer le jeu, il évite même de regarder trop souvent la monture convoitée. Mais soudain...
– Oh, non! s'exclame notre petit ami. Comme pour le faire exprès, le poney s'est tourné d'un autre côté! Sebti n'a plus qu'à faire demi-tour pour tenter une nouvelle approche! Maintenant, notre rusé petit bonhomme s'accroupit. A quelle distance du poney se trouve-t-il? A trente mètres, peut-être. Il avance encore, par petits bonds silencieux.

– C'est le moment! se dit-il. Je vais me lever lentement, avancer encore un peu, et me mettre à courir très vite pour attraper sa queue. Je la tiendrai des deux mains, et je ne la lâcherai plus! Bon, j'y vais... Hélas! le poney a flairé le danger. Hop! il fait un saut gracieux, puis s'en va, trottinant et laissant notre pauvre Sebti désespérément seul avec ses beaux projets. Ce jeu du plus rusé se poursuit plusieurs jours. Mais, pas une seule fois l'enfant ne réussit à gagner la partie! Alors, compatissant, l'oncle intervient:
– Le poney va trop vite, il est trop sauvage! Viens par ici, Sebti! Tu verras, avec un petit âne, c'est bien plus facile! A six ans, Sebti se contentera de cette autre monture. Vite, il saura grimper seul sur le dos du petit âne. Et bientôt, avec ses copains, il jouera même au "Tour de France", chacun étant juché sur son vélo de course à quatre pattes! Mais, en l'absence du père de famille, l'oncle se voit contraint de prendre une grave décision: – Sebti! Si tu passes tout ton temps avec les ânes, tu finiras par être un "kif-kif bourricot!" Demain, tu iras à l'école!
Aïe, aïe, aïe! l'école, ce n'est pas ce que vous pensez. Bientôt, avec un Sebti tout intimidé, nous irons à la découverte de cette école du bled...

Texte: Samuel Grandjean


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