Jeannot et ses exploits - Le porte-monnaie vide
– Il est beau, notre lion! peuvent dire fièrement les habitants de Belfort.
L'une des caractéristiques de leur cité, c'est en effet son lion de vingt-deux mètres de long sur onze de haut, sculpté dans la muraille qui domine la vieille ville. Il rappelle la ténacité inébranlable des défenseurs de Belfort. Encouragés par un vaillant colonel, ces patriotes ont tenu tête à l'envahisseur pendant la guerre de 1870-71.
Mais si Belfort a son grand lion de pierre, à cette étape de notre récit on y trouve d'autres petits «fauves»: Jeannot, Etienne et compagnie! Ils ne sont pas «féroces», mais leur appétit de lion préoccupe la maman quand il faut préparer les repas!
Quant à Daniel, il est parfois un peu bousculé par les deux aînés. Que voulez-vous! Ils aiment leur petit frère et voudraient bien lui enseigner la gymnastique pour qu'il réussisse déjà leurs prouesses.
Hélas! la maladie s'installe dans le foyer. Tant le père que la mère de famille sont atteints dans leur santé. Pendant plusieurs mois les ressources sont bien maigres. Il faut calculer avant chaque dépense. Mais la foi tient bon, heureusement. Jeannot se rend compte des difficultés. Alors il essaie de «coûter» le moins possible. Un samedi soir, soucieux, il s'approche de ses parents:
– J'aurais besoin d'un crayon pour lundi matin à l'école! Est-ce que je peux prendre de l'argent dans le porte-monnaie?
– Oui, prends, Jeannot!
Le jeune garçon ouvre le porte-monnaie... il y reste juste de quoi acheter le crayon! Jeannot sait bien que son père est souffrant dans la chambre voisine. Il sait aussi qu'à la cuisine les dernières réserves sont épuisées. – Que vas-tu faire, maman? Nous n'avons presque plus rien dans le porte-monnaie. Et maintenant, les magasins d'alimentation sont fermés jusqu'à lundi matin! |
Emue, Lydie comprend la détresse de son fils :
– Passe-moi la Bible, Jeannot! Nous allons lire un verset. Tu vois... c'est là: «Ne vous inquiétez donc point, et ne dites pas: Que mangerons-nous? Car toutes ces choses... votre Père céleste sait que vous en avez besoin.» Crois- tu cela, Jeannot?
– Oui, maman!
– Eh bien, à côté de Matthieu 6:32, mets la date d'aujourd'hui dans la marge de ta Bible. Il y est aussi écrit: «Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu!»
Le lendemain, Jeannot pense souvent au verset qu'il a souligné. Sans rien dire à personne, il prie. De leur côté, les parents en font autant. Et les heures passent... Il est midi. On met le couvert, mais il n'y aura qu'une soupe et un reste de pain.
– Et comme ça, j'aurai plus vite fait la vaisselle! s'écrie Etienne qui ne mesure pas la gravité de la situation.
Durant tout l'après-midi, Lydie ne peut que répéter:
– Seigneur! Tu as dit que nous ne devons pas nous inquiéter. Tu vois que pour ce soir, je n'ai plus rien à leur donner... Tu sais de quoi nous avons besoin.
Déjà le soleil se couche. Bientôt il y aura de l'animation dans toutes les cuisines, avec les bruits d'assiettes, le parfum des viandes ou des légumes. Dans toutes les cuisines... vraiment dans toutes?
Drinnn, drinnn!
– Tiens, une visite à cette heure! Veux-tu ouvrir, Jeannot?
– Oui, j'y vais!
La porte grince et Jeannot pousse un cri de joie, oubliant même de saluer son oncle :
– Oh! papa, maman, venez vite... c'est la réponse qui arrive !
L'oncle n'y comprend rien. Pourquoi ces mots et cette réaction de son neveu? Ignorant tout, et simplement pour faire plaisir à cette famille, il apporte un vrai chargement de fruits et de légumes. Mais pourquoi ce jour-là plutôt qu'un autre? S'il n'en sait rien lui-même, Dieu le sait, lui qui n'abandonne jamais ceux qui se confient en lui.
Texte: Samuel Grandjean