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Le naja rouge

 
C'est l'heure du repas. Namtandi, le médecin-missionnaire rentre à la maison.
Après avoir donné une caresse à sa petite Sylvie qui gigote dans son berceau, il s'entretient avec Roselyne, sa femme.

- Rends-toi compte! Il y avait plus de cent malades à examiner, ce matin! Ils reviennent plus nombreux, maintenant que la saison des pluies est finie.

- Tu dois être fatigué! Es-tu vraiment obligé de repartir en brousse cet après-midi?

- Il faut bien, chérie! Si nous ne voulons pas être coupés plus longtemps de la station de Diapaga, nous devons nous occuper sérieusement de la piste. En certains endroits, elle est envahie par des herbes plus hautes que moi! C'est un réel danger, parce qu'elles cachent tous les trous de la piste, et certains sont très gros. Ne les voyant pas, le chauffeur du camion venant de Diapaga ne pourrait pas les éviter. Alors le véhicule serait vite en pièces détachées !

- Heureusement que nos collègues missionnaires sont aussi au travail à l'autre bout. Il paraît qu'ils avancent bien.

- Oui! Si de notre côté nous pouvons continuer à ce rythme avec nos volontaires, dans une quinzaine de jours la piste sera de nouveau praticable. Cet après-midi, avec Oumpinini je vais rejoindre l'équipe au travail. Nous partons à vélo et nous verrons plus loin s'il faut poursuivre à pied...

Quelques heures plus tard, les deux hommes sont en pleine brousse...

- La piste n'est déjà plus bien large ici, passe devant, Oumpinini, je te suis!

- D'accord, Namtandi!

- Heureusement qu'on peut encore rouler à une bonne allure ici.

- Et qu'on réussit quand même à éviter les gros trous!

Sous le ciel bleu, seuls dans l'immensité de ce paysage monotone, ils pédalent, pédalent, sans se douter du danger qui les guette...

Tout à coup, Oumpinini fait un brusque écart sur le chemin! Surpris, le missionnaire n'a pas le temps d'imiter son compagnon. Déjà une branche souple mais résistante s'est prise dans les rayons de sa roue avant.

Vite, Namtandi freine. Mais... jugez de sa stupeur; à moins de dix centimètres de son genou, une gueule ouverte est prête à le mordre!

C'est celle d'un naja rouge, l'un des plus dangereux serpents! Au passage de la bécane, et sous l'effet de la vitesse, son corps a suivi la roue, glissé sous la fourche pour s'enrouler autour de l'axe, entre les rayons! Mais la tête, revenant en arrière avec un sifflement agressif, essaie encore d'atteindre le genou de Namtandi. Heureusement que le reste du corps est retenu par la roue! Prudemment notre ami descend de vélo. Vite une baguette... et quelques bons coups!

Maintenant le naja est étendu, sans vie, sur le chemin. Un mètre quarante de long! Et si le missionnaire avait été mordu? Eh bien, notre ami n'aurait plus pu avancer. Il ne serait pas non plus retourné à Mahadaga, car le venin du naja rouge paralyse la victime en quelques minutes, et cette morsure est toujours mortelle!

Plus tard, dans une lettre apportant beaucoup d'autres nouvelles à sa famille en France, Namtandi raconte cette aventure. Toutefois, il a soin d'ajouter: Je ne vous écris pas cela pour faire sensation: ici les affaires de serpents sont chose courante. Mais c'est plutôt pour que vous puissiez remercier le Seigneur, comme je l'ai fait tout de suite sur le chemin, pour sa protection si évidente.


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