La voie tracée par Job

En lisant les deux premiers chapitres de ce livre, j'ai été frappé de constater comment la Bible nous révèle un riche enseignement sur la personne si mystérieuse et impressionnante qu'est Satan. Dans le monde non chrétien également, elle tient une place importante, elle revient en quelque sorte à la mode, même si parfois on la minimise ou on la tourne en dérision. Cette attitude est bien sûr dangereuse et imprudente. Cependant il est utile à chaque croyant de connaître la pensée de Dieu au sujet de l'ennemi des hommes.

Note: pour suivre cette étude, prenez à côté de vous la Bible, ouverte au début du livre de Job.

  1. Satan a la faculté de se présenter devant Dieu. On aurait pu penser que ces deux personnes occuperaient des milieux bien distincts, sans communication. Il n'en est rien et Dieu permet certains contacts. Il semble que Satan profite de la compagnie des fils de Dieu pour s'infiltrer devant l'Eternel. L'Ecriture est peu explicite à l'égard de ces derniers et il reste difficile de les identifier.
  2. Satan a la faculté de parcourir la terre et de s'y promener. Il observe les humains, retient leurs noms, garde en mémoire leurs actions, leurs conditions de vie, en un mot leur environnement. Quand Satan mentionne Job à Dieu, les deux interlocuteurs se comprennent, savent précisément de qui il s'agit et quels sont les détails de sa vie. A ma connaissance, Satan possède encore cette faculté aujourd'hui et il s'en sert!
  3. Satan a la faculté de discuter avec Dieu. Le sujet de leurs conversations, c'est les hommes. Satan désire évidemment leur perte, spécialement celle des croyants et il les accuse inlassablement (cf. Zacharie 3:1 et Apocalypse 12:10). Combien il nous est précieux de savoir que Jésus-Christ est un avocat dévoué qui défend notre cause auprès du Père. N'oublions pas de recourir aux interventions du Fils de Dieu, d'autant plus qu'elles sont promptes et efficaces. Soyons réconfortés par l'enseignement de 1 Jean 2:1: "Mes petits enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez point. Et si quelqu'un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste."
  4. Dieu laisse provisoirement un pouvoir réel à Satan. Dans un premier temps, il reçoit la permission de dépouiller Job de ses biens et de ses enfants; dans un deuxième, celui de lui imposer une douloureuse maladie. Notons tout de même que le pouvoir satanique a les limites que Dieu lui fixe. Je remarque deux fois dans le texte le mot restrictif "seulement" (cf. 1:12 et 2:6). Au-delà de la barrière imposée, Satan ne peut rien faire. Il est rassurant de constater que si le pouvoir de notre ennemi dépasse celui d'un simple homme, celui de Dieu est plus grand encore, infini.

Ces quelques remarques me conduisent à formuler une conclusion partielle au sujet du mystère de la souffrance. Si certaines épreuves, qui nous arrivent, peuvent provenir parfois de fautes personnelles – l'alcoolique risque une cirrhose du foie – ce n'est pas, et de loin, l'explication de tous les problèmes humains. En effet Job a été sévèrement éprouvé, sans avoir commis de fautes. Cela nous conduit à poser la grave question: Pourquoi une si douloureuse épreuve? La conclusion de cet article essaiera d'y répondre.

De plus nous devons savoir d'une part que la tentation ou l'épreuve ne dépasse jamais les capacités de résistance du croyant et d'autre part que le moyen d'en sortir est déjà préparé. L'expérience de Job ne contredit pas les déclarations de l'apôtre Paul, mais les appuie: "Aucune tentation ne vous est survenue qui n'ait été humaine, et Dieu, qui est fidèle, ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces; mais avec la tentation il préparera aussi le moyen d'en sortir, afin que vous puissiez la supporter" (1 Corinthiens 10:13).

Avant de poursuivre, je désire montrer que Dieu ne prend pas à la légère le problème de la réalité satanique et qu'une solution est déjà trouvée. Bien sûr, nous aimerions que Dieu la mette en pratique immédiatement. Mais l'Eternel, qui n'est jamais pressé, parce qu'il se situe hors de l'échelle humaine, le fera quand il jugera le moment venu, mais il le fera certainement, nous pouvons y compter!

D'abord Satan sera précipité et ne pourra plus perturber le ciel par sa présence et par ses actes (cf. Apocalypse 12:10). Ensuite il sera lié pour mille ans, puis jeté dans l'étang de feu et de soufre pour l'éternité (cf. Apocalypse 20:2-3,10). Alors les foules de croyants pourront vivre éternellement en paix, définitivement délivrées de ses embûches!

Le livre de Job est un des plus anciens de la Bible. Pourtant nous le lisons et l'étudions toujours avec profit. Je m'émerveille de constater le niveau élevé des révélations que les hommes d'autrefois possédaient déjà. Contrairement à ce que nous pensons souvent, ils ne vivaient pas dans de sombres ténèbres!

J'aimerais maintenant focaliser mon propos sur Job lui-même. Je distingue dans sa vie trois périodes:

  1. Une période d'intégrité. Elle est caractérisée par de grandes richesses matérielles, une bénédiction au plan familial – Dieu lui donne une épouse et des enfants – et une piété personnelle profonde remarquable. A la suite des festins douteux de ses enfants, il implore pour eux le pardon de Dieu en lui offrant des holocaustes.
  2. Une période de souffrance. Tout d'abord Job est privé de tous ses biens, ce qui est dur, mais peut-être supportable; puis de ses enfants, ce qui est nettement plus douloureux. Ensuite les souffrances physiques l'accablent. Finalement il est bouleversé moralement, puisque sa femme le lâche et le pousse à la révolte contre Dieu. Il est aussi faussement accusé par ses amis fâcheux.
  3. Une période de bénédiction renouvelée et de prospérité doublée. Tout au long de sa terrible épreuve, Job ne s'est laissé aller à aucune faiblesse. Il est resté parfaitement fidèle à Dieu et il nous donne une exceptionnelle leçon de courage moral et spirituel, à tel point que je me demande si cela n'a pas tendance à devenir une forme d'ascétisme. Qu'il serait bon à ce sujet de pouvoir pénétrer dans l'intimité de Job et de l'interroger personnellement!... C'est évidemment impossible et nous devons nous satisfaire des données de l'Ecriture.
Sans désirer devenir un cinquième ami fâcheux, je ne peux m'empêcher de poser cette question: Job n'a-t-il pas eu trop confiance en lui, en ses facultés humaines, n'a-t-il pas été effleuré par une sorte de sentiment de propre justice, n'a-t-il pas eu tendance à raisonner un peu ainsi: "Dieu a permis que je souffre énormément, mais vous voyez, je tiens bon envers et contre tout, je ne cède pas, je reste fidèle"? Je n'oserais pas l'affirmer par respect pour la force morale de Job, mais je pose la question. En tout cas l'Eternel intervient et nous pouvons lire ces merveilleuses descriptions où Dieu et Job dissertent sur la mer, la terre, les étoiles, le lion, le buffle, l'autruche, l'hippopotame, le crocodile et j'en passe! Ce sont des pages magistrales par lesquelles Dieu montre sa grandeur à Job – et à nous – en contraste avec la petitesse de l'homme.

Puis on en arrive au début du chapitre 42 qui, à mon avis, est la charnière du livre de Job. Il comprend enfin qu'il doit renoncer à lui-même et il s'écrie: "C'est pourquoi je me condamne et je me repens sur la poussière et sur la cendre" (v. 6). Job se rend clairement compte qu'il est en présence de la personne toute-puissante du Dieu créateur et il accepte alors de s'humilier profondément. Dès lors l'épreuve est devenue inutile, elle a accompli son oeuvre de labour dans le terrain du coeur de Job et il est rétabli dans une situation de bénédiction et de prospérité supérieure à la première, avec l'avantage d'avoir mûri et grandi dans la foi.

Nous soupirons avec raison dans nos assemblées à la libération de l'Esprit. Mais chacun est-il d'accord, selon la voie tracée par Job, de renoncer à lui-même? La libération de l'Esprit passe par là et il ne faut pas s'attendre à un renouveau en dehors d'une sérieuse humiliation autant personnelle que collective.

Gilbert Aellig, pasteur.